Côté langue

Fausses idées et bonnes questions

On entend et on lit tout et n’importe quoi à propos du normand. Affirmations plus ou moins fantaisistes autant que péremptoires assénées par des personnes qui n’ont malheureusement aucune formation en linguistique et souvent aucune réelle expérience de terrain. Cependant, si ces idées avancées sont plus souvent fausses, elles permettent d’aborder les bonnes questions. Parmi les déclarations les plus ordinaires, on retiendra : « le patois c’est du français déformé », « les gens des communes voisines ne parlent pas le même patois, il n’y a donc pas de langue normande », « le normand a pour origine le norrois » car « les Normands descendent des Vikings », « le normand existait bien avant le français », « le normand a (ou variante : les parlers normands ont) un vocabulaire très différent et bien plus riche que le français », « il y a peut-être un vocabulaire normand mais pas de grammaire », « pour écrire (ou parler) en normand il suffirait d’avoir à sa disposition un dictionnaire et une grammaire »…

Arrêtons-nous là et tâchons d’y voir un peu plus clair.

Si la Normandie doit son nom à l’arrivée tardive (vers 800) des « hommes du Nord » ou Normands, terme qui semble d’ailleurs avoir été une sorte de générique par lequel les Austrasiens désignaient en francique tous les Germains situés au nord de l’Elbe, et qu’ils auraient importé et acclimaté dans la partie occidentale de l’empire carolingien, il est évident que bien avant l’arrivée des Scandinaves et bien avant le traité de Saint-Clair-sur-Epte en 911 où Charles Le Simple le donne en fief à Rollon, ce territoire a connu une évolution complexe avec des peuplements et des influences ethniques et linguistiques successives qui ont façonné son identité et ses modes d’expression.

Le Viquet n°172